Plongée au coeur de l'IPER du sous-marin Le Téméraire
Le 19 avril dernier, le sous-marin nucléaire lanceur d'engins Le Téméraire est entré au bassin 8, à Brest. Le SNLE y subit son premier grand carénage. Cette opération lourde et complexe, qui s'élève à 200 millions d'euros, durera 21 mois.
09/05/2006
Dans la base navale de Brest, plus de 700 personnes travaillent actuellement sur sous-marin nucléaire lanceur d'engins Le Téméraire. Le navire, qui subi son premier grand carénage depuis sa mise en service, en décembre 1999, est en cale sèche au bassin n°8. Sous l'impressionnant bâtiment de 12.000 tonnes et 138 mètres de long, des dizaines de panneaux de la coque extérieure, en CVR (composite verre-résine), sont entreposés au fond de
Près de 2 millions d'heures de travail
Après quatre mois à l'Ile Longue, le Téméraire restera un an au bassin 8. En avril 2007, il retrouvera la base des SNLE pour une période de cinq mois, qui sera suivie de trois semaines d'entraînement à
Garantir le niveau de discrétion acoustique
L'intérieur du sous-marin ressemble, à s'y méprendre, à un vaste chantier de construction. Les milliers de matériels débarqués sont extraits par des brèches, ouvertures relativement larges qui permettent de manutentionner des éléments relativement lourds. Ce fut, notamment, le cas pour l'un des deux diesel-générateurs assurant l'alimentation de secours. Par endroits, le navire semble littéralement « vidé ». Ainsi, le central opération ne dispose plus d'aucune console, dont on devine, à peine, les emplacements. « Cet entretien majeur est une opération complexe et très pointue en raison, tout d'abord, de la nature du produit. Ce sous-marin dispose d'une discrétion acoustique importante. Il faut donc, à l'issue du remontage, qu'il retrouve cette discrétion », souligne Alain Arzel, le chef de chantier de l'IPER du Téméraire. Suffisamment silencieux pour ne pas être doté d'un revêtement anéchoïque, le SNLE a bénéficié, au cour de sa conception, d'un effort particulièrement important pour réduire les bruits rayonnés. Ainsi, tous les équipements susceptibles de produire un bruit pouvant entraîner la détection du navire ont été placés sur plots élastiques. Ces « tampons » permettent d'absorber les vibrations et donc d'empêcher la propagation des ondes jusqu'à
Au cours de leur entretien majeur, qui intervient désormais tous les 8 ans, les submersibles bénéficient de remises à niveau. Ces évolutions, dont le détail est gardé confidentiel, peuvent, notamment, porter sur les équipements de détection ou sur l'amélioration de la discrétion acoustique.
Challenge financier et calendaire
Par rapport au SNLE-NG 1, qui a achevé sa première IPER en avril 2005, les négociations qui ont abouti au contrat ont été musclées et ont duré près d'un an. Entre temps, DCN avait quitté le statut d'administration pour devenir une société de droit privé : « C'est un projet où il a fallu batailler dur pour les coûts. Ce chantier est un gros challenge puisque les contraintes calendaires et financières sont inférieures de 30% par rapport au Triomphant », précise Alain Arzel. Pour parvenir à rentrer dans l'enveloppe fixée par le SSF, l'entreprise a fait d'importants efforts en matière d'organisation et de sous-traitance. Selon Michel Drévillon : « Pour le Triomphant, nous passions des contrats de sous-traitance globaux, c'est-à-dire que nous laissions des tranches entières à aux entreprises extérieures. Cette fois, nous avons recours à une sous-traitance de spécialistes avec des sociétés disposant de compétences affirmées dans chaque domaine ». En tout, le chantier du Téméraire est réalisé à 60% par la sous-traitance : « Plus de 600 fournisseurs sont sollicités. Le temps étant compté, un projet de cette ampleur nécessite un approvisionnement en avance des matériels nécessaires. Ainsi, 90% des 460.000 articles dont nous avons besoins étaient livrés fin avril. C'est un vrai casse-tête chinois en terme de logistique, notamment pour les petits paquets de pièces de rechange ». Alors que la phase de démontage n'était même pas encore achevée, le 28 avril, 150 matériels visités étaient déjà de retour et certains, en cours de réinstallation à bord. Pour parvenir à remonter le navire avant avril 2007, les 700 personnes actuellement mobilisées sur le navire travaillent en 2/8.
Navire sans équipage et infrastructures de pointe
Si les contraintes imposées sur DCN par la marine sont aujourd'hui plus importantes, la marge de manSuvre des anciens arsenaux s'est, dans le même temps, considérablement accrue. Ainsi, pour la première fois, DCN est totalement responsable de l'IPER d'un SNLE. Maître d'ouvrage, le Service de Soutien de la Flotte est présent sur le chantier mais c'est le maître d'Suvre, DCN, qui est totalement en charge des travaux et de la conduite des installations. L'équipage, qui participait autrefois aux IPER, a été dissout en décembre. « Il est préférable, pour l'organisation et la sécurité, qu'il n'y ait qu'un seul intervenant. La séparation entre le donneur d'ordres et l'industriel est plus saine et plus porteuse de progrès. De plus, la marine n'a, aujourd'hui, pas des effectifs gigantesques et préfère mettre ses personnels sur des navires », explique Yannick Le Yaouanc. Du côté de DCN, cette nouvelle organisation est plutôt bien vécue. Plus libre, l'industriel est à même de bénéficier de son retour d'expérience pour améliorer ses prestations, une compétitivité qu'elle met à profit pour décrocher d'autres marchés. Les nouveaux contrats sont, par ailleurs, assortis d'une modulation de rémunération, avec un intéressement supplémentaire si les travaux sont achevés plus rapidement.
Seule capable de mener ce type de travaux, DCN a lourdement investi, à Brest, dans son outil industriel. C'est ainsi qu'un impressionnant « berceau » de 140 mètres de long et 20 mètres de large a été installé, dans le bassin 8 , à l'occasion de l'IPER du Triomphant : « L'Ile longue n'est pas un chantier productif. Il y a énormément de contraintes, notamment traversée de
Les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins
Le premier décembre 1971, quatre ans après la Grande-Bretagne, la France entrait dans le club très fermé des nations disposant de SNLE. Après une conception et une mise au point longues et fastidieuses, discrètement appuyée par les Etats-Unis, le Redoutable entrait en service. D'une longueur de 128 mètres pour un déplacement en plongée de 9000 tonnes, ce navire allait être suivi de quatre submersibles identiques, les Terrible, Foudroyant, Indomptable et Tonnant, admis au service actif entre décembre 1972 et avril 1980. Cette série sera complétée, cinq ans plus tard, par une sixième unité, plus discrète et dotée du nouveau missile M
________________________________________
" Ecouter l'interview d'Alain Arzel, chef du chantier pour l'IPER du Téméraire
" Voir la fiche technique des SNLE de la classe Le Triomphant
" Voir la fiche technique du SNLE L'Inflexible
" Voir la fiche technique des SNA du type Rubis
" Voir la fiche technique du porte-avions Charles de Gaulle
" Sources techniques: Flottes de Combat 2006