Après trois « belles » années, où le budget du ministère de la Défense  française était en progression, l'heure est aux économies. Comme le  pressentaient militaires et industriels l'an dernier, le maintien des  efforts d'investissements de l'Etat durant la crise (renforcé par une  enveloppe de 2 milliards d'euros dans le cadre du plan de relance),  destinés à soutenir un secteur pourvoyeur de nombreux emplois, devrait  être suivi d'une période de recadrage. Le déficit budgétaire de la  France a, en effet, atteint des sommets et les difficultés de la Grèce  poussent Paris, comme ses partenaires européens, à adopter une politique  de rigueur (même si le terme n'est pas employé en France). Présent à  bord du porte-hélicoptères Jeanne d'Arc vendredi dernier, Hervé Morin a  été très clair : le ministère de la Défense sera, 
comme les autres,  concerné par la lutte contre les déficits publics. « Nos compatriotes  ne comprendraient pas que nous ne fassions pas un effort », a-t-il  déclaré. Dans le cadre de la réduction des déficits, l'Hôtel de Brienne a  reçu, comme l'ensemble des ministères, une lettre de cadrage, qui sera  suivie d'une lettre de plafond de crédits. Pour l'heure, aucun chiffre  n'a été avancé par Hervé Morin. « Nous l'examinons. L'exercice consiste à  concilier les ambitions du Livre Blanc et les efforts des armées au  redressement des comptes publics », a expliqué le ministre, qui  n'apprécie manifestement pas le terme « variable d'ajustement » pour  qualifier les coupes qui seront sans doute opérées dans le budget de la  Défense afin de réduire les déficits.    
 Super Etendard avec un avion ravitailleur (© : MARINE NATIONALE)     Vers une nouvelle guerre de tranchées entre les armées ?
     Le ministre estime que les armées tricolores doivent « conserver  (leurs) capacités » car « l'outil de défense touche, sur le long terme, à  la souveraineté » et à l'existence même de la France comme grande  puissance. Seulement voilà, au-delà des ambitions, il faut faire face à  une réalité budgétaire et donc à des choix, qui s'annoncent difficiles.  Indiquant que le cap serait « fixé par le président de la République »,  Hervé Morin n'a donné aucune précision. Questionné par la rédaction de  Mer et Marine sur d'éventuelles menaces sur les grands programmes, comme  Barracuda (sous-marins) et FREMM (frégates), le ministre a simplement  répondu : « Bien sûr qu'ils pourront être maintenus ! ». Maintenus  certes, mais dans leur format actuel ? Pas de réponse...
   Une fois  de plus, les marins vont sans doute devoir se battre pour conforter des  programmes considérés comme « vitaux » pour assurer les missions de la  flotte française, à commencer par la dissuasion nucléaire et la  projection de puissance. Mais ils ne seront pas les seuls à monter au  front et, à ce jeu là, le match se jouera sans doute à couteaux tirés  avec l'armée de l'Air et l'armée de Terre. Alors que la première défend  ses 
Rafale,  ses A400 M ou encore ses ravitailleurs, la seconde éprouve un besoin  urgent de renouveler ses équipements, notamment en véhicules et en  hélicoptères.  
 Hélicoptère Tigre sur le Mistral  (© : MARINE NATIONALE)       Etalement de programmes et réduction des cibles
     Comme à chaque période de choix budgétaires, des concessions devront  sans doute être effectuées par chacun. Généralement, la recette est  toujours la même : Etalement des programmes et/ou réduction de cibles,  c'est-à-dire diminution du nombre d'unités réalisées. La première  solution, à laquelle l'Etat a pratiquement systématiquement recours, n'a  qu'un seul « avantage » : reporter à plus tard les dépenses. Mais il ne  s'agit là que d'une mesure à court terme car, dans les faits, elle se  traduit toujours par des surcoûts significatifs. L'étalement des  programmes dans le temps entraine, ainsi, une augmentation du prix  unitaire des équipements, sans compter les surcoûts liés au maintien en  service d'unités vieillissantes (voire hors d'âge) nécessitant toujours  plus d'entretien et de réparations. Les finances publiques se privent,  de plus, des gains générés par la mise en service rapide de nouveaux  matériels optimisés. Pour la marine, outre la maintenance réduite, les  nouvelles plateformes, grâce à une automatisation poussée, permettent de  diminuer significativement les équipages, qui représentent actuellement  40% du coût de fonctionnement d'un navire.     
 L'Aquitaine, tête de série du programme FREMM  (© : DCNS)       La réduction des formats d'origine constitue, elle aussi, la « vrai  fausse bonne idée ». Car, là encore, les surcoûts sont importants. Le  dernier exemple en date concerne FREMM. Fin 2005, ce programme était  annoncé à 6.5 milliards d'euros pour 17 frégates. Après une réduction de  la cible à seulement 11 unités et une baisse de la cadence de  production, la facture finale est, aujourd'hui, estimée à 7.8 milliards  d'euros selon les chiffres du ministère de la Défense ! Certes, la série  comprendra deux bâtiments en version antiaérienne (FREDA), non prévus à  l'origine. Mais les modifications nécessaires à ces deux navires  (adaptation du système de combat, radar plus puissant et embarquement de  missiles Aster 30) ne justifient pas un tel écart de prix. C'est bien  la réduction des gains liés à l'effet de série et à une cadence de  production élevée qui aboutira à une note encore plus salée pour le  contribuable. Et, les 9 avisos n'étant finalement pas remplacés par des  FREMM, il faudra, de plus, financer une nouvelle série de patrouilleurs  hauturiers, qui viendront encore alourdir le poids économique d'une  décision parfaitement contreproductive à long terme.     
 Avions du groupe aérien embarqué  (© : MARINE NATIONALE)       Une flotte déjà rationalisée
     Dans la perspective d'une éventuelle réduction d'unités sur les  nouveaux programmes, la marine n'est malheureusement plus très riche et  ses marges de manoeuvre sont des plus limitées. Ces 15 dernière années,  la Rue Royale a eu la bonne (ou la mauvaise) idée de rationaliser  fortement ses moyens. A tous les niveaux, les effectifs ont été  considérablement réduits. La marine ne compte plus que 2 bases navales  principales en métropole (Toulon et Brest) et 6 bases d'aéronautique  navale, desquelles il faudra soustraire Nîmes-Garons, qui doit fermer  l'an prochain. L'exemple de l'aéronautique navale, avec seulement 6700  hommes pour une flotte de 211 aéronefs, illustre parfaitement cette  politique, qui voit l'institution parvenir à remplir ses missions avec  un minimum de moyens. Ainsi, le parc de 
Rafale  Marine, qui devait initialement comprendre plus de 80 avions, n'est  plus fixé aujourd'hui qu'à 60 appareils, juste de quoi assurer un groupe  aérien embarqué tout en prenant en compte les missions de formation,  les périodes de maintenance et les pertes éventuelles. De même, les Lynx  et Super Frelon, au nombre de 41 en 2004, ne seront remplacés que 
par 27  HH90 pour assurer les missions de lutte anti-sous-marine et antinavire,  le transport opérationnel et le sauvetage en mer.       
 Sous-marin du type Rubis  (© : MARINE NATIONALE)     Il en est de même pour la flotte sous-marine, réduite de 6 à 4  sous-marins nucléaires lanceurs d'engins après la chute du mur de Berlin  et à 6 sous-marins d'attaque (contre 16 en 1989 et 10 en 1996). La  flotte de surface n'a pas été épargnée, passant de 44 porte-avions,  croiseurs, frégates, avisos-escorteurs et avisos à 34 unités, ou plutôt  25 car les 9 avisos ont été reclassés en patrouilleurs. Quant à la  composante aéronavale, elle attend toujours le feu vert pour la  construction d'un second porte-avions, seul moyen d'assurer une  disponibilité permanente du groupe aéronaval à la mer. Bien qu'il  s'agisse du seul outil permettant de projeter un groupe aérien n'importe  où dans le monde en un temps très bref et que son coût demeure  objectivement faible (2.5 à 3 milliards d'euros sur 7 ans) au regard des  dépenses d'équipements du ministère (plus de 15 milliards d'euros  chaque année), la construction du bâtiment, hautement symbolique,  demeure en suspens.    
 Groupe aéronaval  (© : MARINE NATIONALE)      « La France sans une grande marine ne saurait rester la France »
     Et pourtant, les enjeux maritimes n'ont jamais été aussi importants.  Alors que plus de 70% du commerce français passe par la mer (dont la  totalité des approvisionnements pétroliers), les menaces sur les lignes  de communication maritimes se démultiplient. Il y a le terrorisme et la  très médiatique piraterie, dont les Français n'ont sans doute pas encore  saisi l'ensemble des enjeux. Au-delà de simples prises d'otages, c'est  l'économie elle-même qui est directement touchée. La piraterie engendre,  en effet, d'importants surcoûts pour les armateurs (assurances, primes,  financement d'équipes de protection embarquées) qui peuvent fragiliser  le modèle économique des entreprises mais, surtout, sont répercutées sur  le prix du transport maritime et, in fine, sur le consommateur et le  fameux « panier de la ménagère ». Pour l'heure, l'impact a pu être  limité, notamment parce que la baisse du prix du pétrole durant la crise  a permis aux compagnies de générer des économies, voire d'effectuer de  grands détours pour éviter les zones à risque. Ce contexte ne durera  toutefois pas et le renforcement des moyens navals en océan Indien, en  attendant que la vraie solution (qui passe par une restauration d'un  Etat de droit en Somalie) soit trouvée, constitue la seule parade  efficace.    
 Escorte dans le golfe d'Aden  (© : MARINE NATIONALE)       Il y a toutefois plus grave. Même si leurs attaques se démultiplient,  les pirates ne sont pas en mesure d'interrompre le trafic maritime. En  revanche, l'éclatement de crise, notamment dans la région du golfe  Persique, peut aboutir à cette situation, dont les conséquences seraient  catastrophiques pour l'économie européenne. Miner le détroit d'Ormuz,  par exemple, suffirait à provoquer rapidement une pénurie d'essence.  Pour éviter cela, les capacités d'intervention aéronavales sont  essentielles, ne serait-ce que pour l'effet de dissuasion qu'elles  offrent.
De manière générale, on notera aussi que les théâtres  d'opérations sont aujourd'hui très  éloignés du territoire métropolitain  et l'océan reste seul moyen d'y intervenir rapidement et en toute  liberté, en s'affranchissant notamment des autorisations nécessaires au  franchissement des espaces aériens. A ce titre, l'emploi du porte-avions  ou des missiles de croisière qui seront embarqués sur les futurs  Barracuda et FREMM paraissent plus que jamais essentiels à la  crédibilité militaire de la France sur la scène internationale. Les  opérations les plus récentes, comme l'Irak et l'Afghanistan, ont  d'ailleurs démontré que la majorité des frappes venaient de la mer  (aviation embarquée et missiles de croisière) et que l'implantation de  bases à proximité de l'action nécessitait de longs mois, incompatibles  avec la nécessité d'engager rapidement les opérations. La marine  constitue donc une incomparable force de dissuasion (nucléaire ou non)  et une sorte de « cavalerie légère », pouvant intervenir immédiatement  en attendant le déploiement, plus lent, des forces lourdes.       « La  marine se trouve maintenant 
et sans  doute pour la première fois de son histoire au premier plan de la  puissance guerrière de la France et ce sera, dans l'avenir, tous les  jours un peu plus vrai », disait en 1965 Charles de Gaulle. Et c'est  d'ailleurs le général qu'Hervé Morin a cité pour conclure son discours  prononcé le 21 mai à bord de la Jeanne d'Arc : « La France sans une  grande marine ne saurait rester la France », a-t-il dit devant  l'équipage. De fait, malgré les coupes sombres dans le budget, la Marine  nationale reste une grande flotte, du moins au sens qualitatif du  terme. Mais l'équilibre est fragile et le grain budgétaire qui s'annonce  pourrait amener une nouvelle tempête dont les marins, avec leur petit  mais performant navire, espèrent ne pas 
sortir en trop mauvais état.    
 Vue du futur Barracuda  (© : DCNS)     Des programmes calculés au plus juste
     Ces dernières années, tous les nouveaux programmes ont été calculés  au plus juste. « Il n'y a pas de gras », aiment à dire les marins en  privé - car ils ne sont pas du genre à réclamer. Ils s'adaptent. Mais  cette adaptation a ses limites. Quatre SNLE, c'est le minimum pour avoir  la certitude d'assurer en permanence l'« assurance vie » qu'offre au  pays la dissuasion nucléaire. Six SNA, c'est aussi la taille critique en  dessous de laquelle la marine ne sera plus en mesure d'assurer toutes  les missions qui lui sont aujourd'hui confiées et de former le vivier de  sous-mariniers qui permet de disposer des compétences nécessaires à la  mise en oeuvre des SNLE. La protection de ces bâtiments nécessite aussi  de disposer d'importants moyens navals et aériens (frégates, chasseurs  de mines, hélicoptères de lutte anti-sous-marine, avions de patrouille  maritime), également chargés de protéger le groupe aéronaval et les  groupes amphibies chargés de déployer les unités de l'armée de Terre par  la mer. Pour ces derniers, c'est le porte-avions et son groupe aérien  embarqué, qui assure une bulle de protection et une capacité de frappe  ou de soutien.    
 SNLE et frégate ASM  (© : MARINE NATIONALE)   
 Avion de patrouille maritime  (© : MARINE NATIONALE)   
 SEM survolant le Charles de Gaulle  (© : MARINE NATIONALE)   
 Rafale au catapultage  (© : MARINE NATIONALE)     
 Débarquement à partir du Mistral  (© : JEAN-LOUIS VENNE)  
 Débarquement à partir du Mistral  (© : JEAN-LOUIS VENNE) 
 Frégate ASM et FDA  (© : MARINE NATIONALE)   
 Ravitaillement à la mer  (© : MARINE NATIONALE)   
 Neutralisation d'une mine  (© : MARINE NATIONALE)           Pour protéger le porte-avions, il faut des frégates de défense  aérienne (FDA) et de lutte ASM performantes, ainsi qu'un SNA pour  contrer un ennemi venu des profondeurs (capacité d'autant plus  importantes que les sous-marins prolifèrent actuellement). Pour  permettre à l'ensemble de ces forces de se déployer loin et longtemps,  une flotte logistique est évidemment nécessaire. Combustible, munitions,  vivres, pièces de rechange... Cette composante de l'ombre est tout  aussi vitale pour assurer le succès des opérations. Il ne faut pas, non  plus, oublier la force de guerre des mines, qui assure la sauvegarde des  chenaux d'accès empruntés par les SNLE, tout en veillant à dépolluer  les plages de débarquement ou les détroits stratégiques par où  transitent les navires de commerce approvisionnant les ports et  raffineries françaises. Mises en oeuvre depuis frégates, sous-marins ou  moyens aériens, les forces spéciales, ont, enfin un rôle déterminant en  termes de renseignement, de préparation des zones d'intervention ou  d'actions ciblées.    
 Commando marine  (© : MARINE NATIONALE)       La marine est donc un édifice dont chaque composante constitue un  pilier. Interdépendants et complémentaires, les équipements, et tout  aussi importants les 
savoir-faire,  sont étroitement imbriqués, de manière à faire fonctionner correctement  l'ensemble de la machine. Aujourd'hui, celle-ci tourne avec des moyens  peu nombreux, parfois même à la limite de la rupture capacitaire, mais  encore suffisants pour assurer une cohérence d'ensemble (en dehors de la  capacité « porte-avions » qui est indisponible lors des arrêts  techniques du Charles de Gaulle) en tenant compte des immobilisations  liées à la maintenance. En revanche, compte tenu des rationalisations  déjà effectuées précédemment, toute réduction dans certaines  composantes, comme les frégates et les sous-marins, aboutirait  aujourd'hui à fragiliser l'édifice, entrainant inévitablement, à  certains moments, l'incapacité de mener certaines missions, y compris  les plus importantes. Tel un jeu de Mikado dont le placement des  baguettes ne doit rien au hasard, la flotte française a subi depuis 20  ans, au gré des coupes budgétaires, le retrait des éléments les moins  vitaux. Désormais, elle tient en équilibre mais il ne faudrait pas, en  retirant quelques baguettes supplémentaires, que la construction finisse  par s'effondrer.    
 Interception de narcotrafiquants  (© : MARINE NATIONALE)       Action de l'Etat en mer : Mettre à contribution les autres ministères
     Malgré tout, les marins le savent bien : ils devront, comme leurs  camarades de l'Air et de Terre, contribuer aux efforts. Car leur statut  de « bons élèves » en matière de rationalisation, reconnu plusieurs fois  par les services de l'Etat, ne les en dispensera pas. Concernant les  grands programmes, aucune marge de manoeuvre n'est aujourd'hui  disponible sans mettre en péril la cohérence d'ensemble. Si le pouvoir  politique choisit cette voie, il devra alors faire des choix  potentiellement lourds de conséquences. Plus raisonnablement, des gains  peuvent sans doute être encore réalisés dans le fonctionnement de  l'institution, notamment dans ses services administratifs et au niveau  du soutien. Cette logique est déjà mise en oeuvre dans le cadre de la  réduction d'effectifs prévue par le Livre Blanc. Mais il ne faut pas se  faire d'illusions, les économies n'atteindront pas des sommes  astronomiques. Puisqu'il faut faire des choix, les yeux se tournent donc  vers les activités de la flotte, à classer par ordre de priorité.    
 La frégate Prairial en Polynésie  (© : MARINE NATIONALE)       Aux fonctions purement « guerrières », la marine doit également  répondre au développement de missions qui ne sont pas purement  militaires. De Saint-Pierre et Miquelon à la Polynésie, en passant par  les Antilles, le canal du Mozambique, les terres australes et  antarctiques et bien entendu les eaux métropolitaines... Sur les 11  millions de kilomètres carrés de sa zone économique exclusive française,  la seconde du monde par son ampleur, la flotte doit veiller à la  protection de ressources naturelles dont la raréfaction générale dans  les prochaines décennies suscitera de plus en plus de convoitises. Dans  le même temps, la marine doit mobiliser de plus en plus de moyens pour  lutter contre le narcotrafic qui, dans les Antilles, en Atlantique et en  Méditerranée, passe par la mer avant d'irriguer les grands « marchés »,  à commencer par l'Europe.    
 Un bateau de clandestins en Méditerranée  (© : MARINE NATIONALE)   
 Sauvetage du MSC Napoli, en 2007  (© : MARINE NATIONALE)   
 Lutte contre la pollution  (© : MARINE NATIONALE)   
 Evacuation d'un passager sur un paquebot  (© : MARINE NATIONALE)         Que dire aussi de la pression croissante de l'immigration clandestine  et de ces milliers de candidats à l'exil tentant de traverser la  Méditerranée pour atteindre l'Eldorado européen ? Et du secours en mer,  qui nécessite la mobilisation de moyens conséquents pour recueillir des  milliers de personnes au large de nos côtes et porter assistance à des  navires en difficulté, afin d'éviter des naufrages et de potentiel  désastres écologiques ? On évoquera aussi la participation régulière des  bâtiments à des opérations d'assistance aux populations suite à des  catastrophes naturelles, comme récemment en Haïti (tremblement de terre)  et en Polynésie (cyclone Tomas). Dans un contexte budgétaire de plus en  plus contraint, la marine a-t-elle encore les moyens d'assumer seule  ces missions ? La réponse sonne aujourd'hui comme une évidence pour les  militaires, qui souhaitent concentrer les moyens sur leur mission  première : La défense. Il convient donc, notamment dans le cadre de la  montée en puissance de la fonction garde-côtes, de voir comment les  autres ministères pourraient épauler financièrement la marine et  financer les équipements liés à la lutte contre le narcotrafic,  l'immigration clandestine, la police des pêches ou encore le sauvetage  en mer. Ainsi, les ministères de l'Ecologie, de l'Economie, de  l'Intérieur ou encore de l'Immigration vont, sans doute, être invités à  participer aux efforts financiers pour des missions qui, naturellement,  relèvent de leurs compétences. Il y a sans doute, dans ce cadre, le  moyen de soulager sensiblement le budget dédié aux moyens navals.    
 Interception d'un palangrier en pêche illicite  (© : MARINE NATIONALE)       De la justesse des arbitrages
     Pour conclure, il ne s'agit pas d'effectuer un plaidoyer en faveur  de la marine mais, simplement, d'ouvrir les yeux sur quelques vérités.  Celles-ci échappent parfois à une opinion publique et un pouvoir  politique qui, depuis l'époque napoléonienne, ont une vision très «  terrienne » de la géostratégie. Loin des yeux, loin du coeur ou de  l'esprit, les enjeux maritimes sont peut-être diffus, mais plus que  jamais essentiels. L'outil de défense doit en tenir compte. Soldats,  aviateurs et marins offrent des capacités complémentaires, permettant au  pouvoir politique de défendre les intérêts du pays et de faire valoir  la position de la France dans le monde. Armée de Terre, Armée de l'Air  et Marine nationale sont toutes les trois indispensables et doivent  bénéficier des investissements nécessaires à la poursuite de leurs  missions et à l'évolution des menaces. Dans cette perspective, il est du  devoir de l'Etat de concilier ambitions et capacités financières. Un  arbitrage qui ne doit pas se faire à la faveur des lobbies, mais bien  dans l'intérêt de la France et des Français.          
 (© : MARINE NATIONALE)